Un texte de Claude Turmes, député européen du Groupe de Verts (G-D. Luxembourg).

Pour des graphiques de meilleure qualité, téléchargez la version pdf ci-jointe.

Préambule

Claude Turmes est vice-président du groupe des Verts au parlement européen.
Spécialiste des questions énergétiques, il présente les balises des verts
européens pour réduire de 30 pc les émissions de gaz à effet de serre au plan
européen. Son message principal: l’effort d’innovation doit autant porter sur
l’organisation de notre société que sur les technologies.

L’enjeu : généraliser les expériences pilote en énergies
renouvelables

Cela devient presque une banalité de le dire, mais l’urgence d’agir pour
réduire radicalement nos émissions de gaz à effet de serre est extrême. Pour au
moins deux raisons. Primo, les scientifiques sont nettement plus alarmistes sur
l’évolution du climat qu’il y a cinq ou dix ans. Secundo, nous avons raté le
virage du Sommet mondial de Rio. Dans les années ’90, beaucoup de bonnes
déclarations ont été faites mais la conjugaison de l’action des lobbies des
énergies fossiles et de la baisse des prix du pétrole a eu pour conséquence que
les mesures préconisées par les Verts n’ont pas été mises en place. Nous avons
perdu dix précieuses années. Heureusement, aujourd’hui la prise de
conscience s’est élargie et des progrès techniques considérables ont été réalisés,
notamment dans le domaine des énergies renouvelables et de la maîtrise de la
consommation. Nous sommes par exemple aujourd’hui en mesure de
construire des maisons passives, c’est-à-dire qui ne consomment aucune
énergie et qui peuvent même en produire. L’enjeu aujourd’hui, c’est bien sûr
de généraliser au niveau européen voire mondial les expériences locales et
régionales de développement des énergies renouvelables et des économies
d’énergie que l’on peut trouver dans certains pays avancés comme le
Danemark.

Le défi est d’abord organisationnel avant d’être technique

Mais fondamentalement, nous devons bien prendre conscience que le
problème du changement climatique est le symptôme de la crise d’un mode de
production basé sur le gaspillage des ressources. Notre monde s’est construit
sur la base du mode de vie d’une classe moyenne d’1,2 milliard de personnes
vivant dans la triade Etats-Unis, Europe, Japon. Alors que leur consommation
à outrance a d’ores-et-déjà mis les écosystèmes sous pression, son extension
aux habitants des pays émergents entraînera un stress énorme sur les
ressources et représentera une menace colossale de déraillement des grands
systèmes écologiques. L’exemple de la surexploitation des réserves de poissons
est éclairant. Elle résulte directement de l’adoption par la Chine et par l’Inde
des modes de consommation des classes moyennes européenne et américaine.
Plus généralement, nous assistons à une faillite des systèmes capitaliste et
communiste qui ne tiennent pas compte du caractère limité des ressources
dont nous disposons.

Face à cette évolution, la tendance des socialistes et des partis de droite est de
faire croire que des solutions techniques nous permettront de ne pas changer
nos modes de vie. Or, il convient de bien prendre conscience du fait que nous
ne pouvons pas espérer qu’un Harry Potter viendra trouver une solution
magique à brève échéance.

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Le graphique ci-dessus nous montre que seules les économies d’énergie, la
biomasse, l’éolien représentent des solutions techniquement et
économiquement viables à l’heure actuelle. Il ne faut rien attendre de
l’hydrogène avant 25 ans. La technologie de séquestration du carbone ne sera
pas disponible avant 2020. Or, une grande partie des centrales électriques
(celles qui ont été construites dans les années ’70) arrive en fin de vie. Le
secteur va donc procéder à leur remplacement dans les prochaines années, bien
avant que la technique séquestration ne soit disponible. Quant à la fusion
nucléaire, elle ne pourra commencer à être techniquement viable qu’après
2050. Il sera alors largement trop tard pour sauver notre climat. En effet, tous
les scientifiques nous disent que nous ne disposons que d’une fenêtre de 10 à
12 ans pour stabiliser le climat mondial et limiter à 2° la hausse moyenne des
températures planétaires d’ici la fin de ce siècle. Le défi est donc beaucoup plus
organisationnel, politique et social que technique.

L’Europe doit devenir leader mondial d’une autre politique

Dans un monde dont les ressources sont limitées, la responsabilité historique
de l’Europe est de créer un nouveau modèle économique qui combine une
haute qualité de vie et le maintien d’une empreinte écologique ne dépassant
pas les capacités de la planète. Nous devons garantir l’équité inter- et intragénérationnelle
plus que dans n’importe quelle autre partie du monde. Cela
veut dire ne pas vivre aux dépens d’autres parties du monde et des
générations futures. Seule l’Union Européenne représente une masse critique
suffisante pour réaliser ce nouveau modèle et peser dans les négociations
internationales dans le sens d’une réelle maîtrise globale des émissions de Gaz
à Effet de Serre. Elle dispose de la taille économique suffisant. Elle peut
également mettre en place une réelle synergie entre toutes les têtes pensantes
présentes sur son territoire et elle a les moyens de se doter des instruments
normatifs nécessaires à une réduction de la consommation d’énergies fossiles
et à un développement du renouvelable. Dans ce cadre, les trois balises de la
politique européenne de l’énergie doivent être la prévention des changements
climatiques, l’anticipation des problèmes d’approvisionnement en pétrole, la
réduction et l’élimination du risque nucléaire.

Comment être les champions de l ‘innovation organisationnelle ?

Si nous ne devons pas nous attendre à ce que la technique nous apporte toute
la solution du problème énergétique, les Verts doivent cependant défendre
l’innovation technologique. Il existe encore de formidables potentiels de
progrès dans le logement à basse énergie, la classification des appareils
électroménagers, le train-tram, l’éolien off-shore, l’électricité solaire thermique,
la séquestration du carbone… Mais nous devons surtout être les champions de
l’innovation organisationnelle.

Celle-ci se situe à quatre niveaux.

  1. les concepts politiques (éco-fiscalité, système d’échange de quotas,
    régulation, normes de produits…).
  2. les concepts de planification (planification urbanistique, infrastructure,
    recherche )
  3. les concepts financiers (systèmes de tiers investisseurs[Les formules de prêts à taux réduits mis en oeuvre en Allemagne par la KFW sont plus
    efficaces qu’un système de primes. La KFW (Kredietanstalt für Wiederaufbau, la Banque
    créée en 1945 pour financer la reconstruction de l’Allemagne) est un organisme public de
    crédit qui octroie des prêts à taux réduits (1 ou 2 pc) pour des investissements dans les
    économies d’énergie ou l’acquisition de panneaux solaires. Ces formules particulièrement
    attractives pour les consommateurs sont financées par des subventions publiques. Le
    système est souple (ce sont les agences de la KFW qui gèrent les demandes) et permet aux
    usagers de disposer de l’intégralité des moyens d’investissement AVANT la réalisation des
    travaux. Autrement dit, l’usager ne doit pas les préfinancer.] plutôt que les
    primes).
  4. le marketing social pour accélérer les changements de comportement.

Ce dernier point est capital. Nous avons besoin de déployer une expertise d’un
genre nouveau dans la production du changement des modes de vie. Les
pratiques de développement durable ne peuvent plus se limiter à une petite
frange conscientisée de la population. Il s’agit de parvenir à un changement de
masse. Cela requiert des investissements considérables, notamment pour
connaître les comportements des publics, leurs attentes et les moyens de
modifier les comportements des consommateurs. Nous manquons cruellement
d’une expertise très fine, par exemple, dans le secteur du bâtiment, pour faire
évoluer les professionnels comme les architectes ou les agents immobiliers vers
une meilleure performance énergétique. Nous devrons agir simultanément au
niveau européen, pour établir les standards de consommation, au niveau
national pour mettre en place des agences spécialisées dans le marketing social,
bien adaptées aux différents marchés nationaux et enfin au niveau local pour
créer les infrastructures adaptées, qu’il s’agisse de quartiers durables ou de
pistes cyclables. Il y a là un défi important pour les Verts. Par le passé, nous
avons été sans doute culpabilisateur (notre communication trop carrée, pris les
gens de front) dans les exigences en termes de changements de mode de vie.

Par exemple, la stigmatisation de la voiture ne sert à rien si on ne crée pas un
cadre dans lequel les gens peuvent prendre plus facilement les transports en
commun. Ce genre de communication empêche le renouvellement des
technologies. Inversement il ne faut pas tout attendre de la modernisation
technologique. Nous avons besoin de cadres politiques intégrés (normes, écofiscalité,
infrastructures) pour permettre aux individus, aux entreprises et aux
collectivités d’évoluer.

Le scénario des Verts européens

En 2006, les Verts européens ont confié à un bureau allemand, l’Oeko-Institut,
le soin de réaliser une étude sur un scénario énergétique permettant de
combiner la réduction des gaz à effet de serre (-30 pc à l’horizon 2020) et la
sortie du nucléaire. C’est la seule étude européenne qui évoque avec précision
les potentiels de réduction des émissions de Gaz à Effet de Serre et qui avance
quinze mesures concrètes pour y parvenir.

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Réductions des émissions de gaz à effet de serre dans le scénario des Verts européens entre 1990 et 2030

Le transport encore et toujours à la traîne

Le secteur du transport devra faire un gros effort. Selon l’Oeko-Institut, on
peut y réduire les émissions de Gaz à Effet de Serre de manière substantielle en
combinant au moins quatre types de mesures :

  1. une augmentation de l’efficacité énergétique des voitures (elles doivent
    émettre en moyenne 80 grammes de CO2/km d’ici 2020).
  2. la part de marché du rail doit augmenter de 10 pc en marchandises et en
    voyageurs (entre 2000 et 2020).
  3. l’aviation doit entrer dans le système de marché de quotas d’émissions (la
    solution la plus efficace sera d’introduire une taxe sur le kérosène).
  4. si nous parvenons à réduire nettement la demande de transports
    (essentiellement de transports routiers), les biocarburants peuvent
    constituer une partie (à ne surtout pas surestimer). Ils pourraient alors
    passer de 5,75 pc du total des carburants en 2010 à 18 pc en 2020 et 25 pc en
    2030. 75 pc d’entre eux doivent être de la seconde génération, c’est-à-dire
    qu’ils doivent provenir de systèmes bénéficiant d’une bonne certification
    environnementale et présentant un rendement énergétique supérieur à
    celui de la betterave transformée en éthanol, par exemple. Mais il ne faut
    surtout pas croire ou laisser croire que les biocarburants forment la
    panacée. Ils ne remplaceront jamais qu’une toute petite partie du pétrole,
    du moins si on en reste au tout à la route et à l’avion actuel.

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Le secteur des transports : scénarii à politique inchangée et volontariste

Le premier type de mesure représente le plus grand potentiel et est tout à fait
réalisable sur le plan technique, que l’on songe notamment au développement
des technologies de motorisation hybride. Un éventuel effet rebond
(l’amélioration des performances individuelles étant surcompensée par une
augmentation globale de la consommation) pourrait être compensé par un
relèvement des prix des carburants. Mais nous devons également agir de
manière beaucoup plus déterminée pour développer des infrastructures
européennes de transports en commun. A cet égard, la révision de
l’Eurovignette à laquelle l’Union européenne a procédé en 2006 constitue un
véritable scandale. Le niveau de taxation maximal de l’usage de l’infrastructure
autorisé équivaut au tiers de celui pratiqué en Suisse. Or dans ce pays, il a fallu
augmenter trois fois la redevance kilométrique sur les camions avant de
parvenir à un transfert modal. Il faudra donc modifier cette directive et,
comme en Suisse, affecter les recettes qui en découleraient aux alternatives à la
route et par exemple à la réalisation d’un réseau de TGV européen. Dans l’UE,
le TGV doit devenir le moyen de transport le plus utilisé pour relier les
grandes villes. Au Japon, il est totalement impensable de prendre sa voiture
pour faire 500 kilomètres, les gens prennent le TGV.

La révolution des transports commence dans les villes

Nous devons également repenser l’aménagement du territoire de manière à ce
que les Européens habitent de plus en plus là où ils travaillent. Cela implique
de densifier les villes et de les rendre plus conviviales et agréables à vivre en y
réduisant drastiquement la présence de l’automobile.

Il faut insister sur le fait que nous devons absolument parvenir à réduire la
pression des transports routiers motorisés dans les villes. Près de 80 pc des
Européens vivent dans des agglomérations et près de 80 pc des déplacements
routiers sont effectués en ville ou en direction des villes et des agglomérations.
Cela génère une très grande masse d’émissions de gaz à effet de serre. Pour
s’en rendre compte, il suffit de rappeler que l’agglomération de Londres est
responsable de la même quantité d’émissions de gaz à effet de serre que
l’ensemble du Portugal ! Tout n’y est bien sûr pas imputable aux transports,
mais ils y pèsent d’un poids important. Les Verts doivent donc plaider pour
une alliance entre les grandes villes européennes (comme la Région
bruxelloise…) et l’Union européenne sur la réduction du poids du transport
routier. Nous devons mettre en place des programmes d’action à long terme
pour faire des agglomérations européennes des villes durables où la priorité
absolue est donnée aux piétons, aux cyclistes et aux transports en commun.
Cela permettra aussi de convaincre un nombre croissant de personnes de
revenir habiter en ville près des lieux de travail.

Bâtiments : pas le temps pour des demi-mesures d’économies !

Après le transport, le secteur où nous devons réaliser le plus d’efforts est représenté par les bâtiments.

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Il est capital de comprendre que nous ne pouvons nous contenter de petites
améliorations des Performances Energétiques des Bâtiments (PEB). En effet, les
cycles de rénovation des bâtiments durent en moyenne de 25 à 30 ans, ce qui
correspond à la durée moyenne d’une génération qui s’installe dans un
nouveau logement. Par conséquent, si nous nous contentons d’améliorer les
PEB de 20 ou 30 pc, nous bloquons pour 25 ans toute perspective
d’amélioration supplémentaire. Or celles-ci seront indispensables ! Nous
devons donc être beaucoup plus volontaristes et viser d’emblée des
améliorations de la PEB de l’ordre de 60 à 80 pc ! A l’heure actuelle, 40 pc de
toute l’énergie consommée dans l’UE est consommée dans les bâtiments (plus
de 50 pc du gaz consommé en Europe l’est dans les bâtiments et 75 pc de ce
gaz est d’origine russe…). La stratégie des Verts est de réduire l’utilisation du
gaz dans les bâtiments et d’utiliser ce gaz pour sortir plus rapidement du
charbon et du nucléaire. La croissance de la consommation de l’électricité dans
le secteur tertiaire nous confronte actuellement au risque d’un retour du
charbon, notamment en raison des prix du gaz qui sont plus élevés. Or, chacun
sait que le charbon est encore plus dangereux en termes d’effet de serre que le
gaz.

Des instruments européens pour réduire la consommation
d’électricité

L’Union européenne dispose d’au moins quatre types d’instruments pour
promouvoir la réduction des consommations électriques : l’imposition de
standards minimaux, l’octroi de labels, les politiques d’achats publics (aux
USA, les administrations publiques sont obligées de toujours acheter les
appareils les plus performants) et la baisse de la TVA pour les appareils de
type A. Sur ce plan Gordon Brown, le chancelier de l’Echiquier (le ministre
britannique des Finances) a proposé au conseil ECOFIN de réduire
drastiquement la TVA sur les appareils de classe A. Par ailleurs, nous devons
absolument éviter d’utiliser de l’électricité dans les systèmes de chauffage et de
refroidissement. En Suisse, l’Etat n’autorise l’installation de systèmes de
conditionnement d’air dans les bâtiments publics et tertiaires privés qu’à la
condition expresse qu’il ait été démontré qu’il n’y avait aucune alternative. En
outre, nous devons éviter l’achat de matériels peu efficaces (lampes,
ordinateurs, verrières…) qui créent des besoins de climatisation. Il faut
également voir l’énorme potentiel d’utilisation du solaire dans les systèmes de
refroidissement. Enfin, il est clair que sans cogénération (électricité/chaleur)
tous les scénarii de réduction des émissions de gaz à effet de serre implosent.

Sommet européen : pas de conscience suffisante des changements requis

Au terme du Sommet européen des 8 et 9 mars, l’Union européenne a décidé
de réduire de 30 pc les émissions de Gaz à Effet de Serre de l’Europe, si un
accord international se dégage en ce sens (en ce compris les USA) et de 20 pc
de manière unilatérale. Pour y parvenir, l’UE se fixe comme objectif d’atteindre
20 pc d’énergie d’origine renouvelable. Le Sommet a également fixé à 20 pc
l’économie d’énergie à réaliser d’ici 2020. L’UE a donc confirmé que les
énergies renouvelables restent la première technologie pour combattre les
changements climatiques. Surtout, la France n’est pas parvenue à ce que le
nucléaire soit assimilé à une énergie renouvelable. Une lecture optimiste des
décisions y verrait un bon premier pas. Une lecture pessimiste pointerait le
risque de renationalisation des politiques énergétiques. Mais au bilan, on ne
peut qu’être frappé par le manque de conscience de la plupart des décideurs
politiques quant à l’ampleur des changements que nous devrons réaliser pour
respecter ces objectifs ! L’Union européenne ne se rend pas encore bien compte
de tous les changements structurels qu’elle va devoir accomplir !

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Ce tableau qui reprend les objectifs chiffrés du Sommet montre bien l’ambition
des chefs d’Etat européens. Il traduit en millions de tonnes équivalent pétrole,
la réduction de 20 pc de la consommation et l’augmentation à 20 pc des
énergies renouvelables. On voit aussi que si les décisions sont réellement
appliquées, le charbon (solid fuels) et le nucléaire (nuclear) vont littéralement
fondre d’ici vingt ans, ce qui explique la nervosité qui s’est emparée de ces
secteurs au lendemain du Sommet. Mais le gros problème, c’est que si les
objectifs sont bien là, les mesures concrètes, elles, brillent par leur absence.

21 énergies renouvelables pour le XXIème siècle

Pour atteindre ces objectifs ambitieux en matière d’énergies renouvelables,
nous avons besoin d’instruments européens très puissants. Nous devons non
seulement continuer le développement des énergies renouvelables existantes
mais nous devons nous doter d’une directive sur l’électricité qui continue de
donner un accès prioritaire au réseau aux renouvelables. L’Union doit aussi se
doter d’une nouvelle directive qui assurera la promotion des réseaux de
chaleur. Si nous parvenons à maîtriser la demande, nous disposerons de réelles
potentialités en matière de production d’électricité par les énergies
renouvelables. Nous les estimons à 44 pc en 2020 et 59 pc en 2030. Cela passera
d’abord par le développement de l’éolien offshore, la biomasse (il y a un très
fort potentiel dans l’est de l’Europe, avec cogénération), l’énergie des vagues,
le solaire thermoélectrique (en Espagne, quatre centrales de la production
d’électricité fonctionnent grâce à un système de miroirs concentrant la lumière
du soleil et vont atteindre chacune une puissance de 50 MW). Il faudra utiliser
toute la variété des énergies renouvelables et des technologies qui permettent
de les exploiter.

Sauver la biodiversité dans le secteur de l’électricité

Nous devons également renforcer la biodiversité dans le marché du gaz et de
l’électricité. Cela impliquera notamment une harmonisation des pouvoirs des
régulateurs et des autorités anti-cartel nationales. Nous avons besoin d’un
régulateur européen transfrontalier. Il s’agit également de mettre un terme à
toutes les formes de subsides dont bénéficient encore les secteurs du charbon et
du nucléaire.

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Un nouveau pacte de stabilité climatique

Nous avons besoin d’un nouveau pacte de stabilité pour le climat, sur le
modèle du pacte de stabilité budgétaire. Ce pacte devra comporter des objectifs
horizontaux : une hausse maximale des températures limitée à deux degrés
celsius, un objectif ultime de 100 pc d’énergies renouvelables, le recours à un
indicateur d’efficacité plutôt qu’à un indicateur de croissance. Pour y parvenir,
l’UE devra se doter d’un système de « carotte et de bâton » pour les Etats membres
(…), les mesures en matière d’éco-fiscalité devront être approuvées à
la majorité qualifiée et nous devrons développer de nouveaux instruments
financiers (notamment au niveau de la Banque Européenne d’Investissements).
Quant aux Verts, ils doivent s’engager dans une stratégie des « oui » (aux
renouvelables, à l’efficacité énergétique) plutôt que dans une stratégie des
« non ». Le nucléaire est le seul point sur lequel nous devons maintenir notre
veto parce qu’il est vraiment une stratégie de tous les dangers (prolifération,
terrorisme, déchets…). Notre stratégie doit également viser à soutenir tous les
pionniers au plan local, comme régional. C’est la raison pour laquelle le niveau
local est tellement important pour nous. Nous devons également faire des
alliances ponctuelles avec les secteurs industriels progressistes et notamment
avec les secteurs qui peuvent profiter de la révolution énergétique et
notamment le secteur financier.

Conclusion

Répétons que le défi auquel nous sommes confrontés est d’abord politique
avant d’être technologique. Comme le dit Al Gore, les politiques ont mis vingt
ans à s’émanciper des lobbies du tabac pour imposer des mesures anti-tabac.
Des centaines de milliers de morts n’ont pu dès lors être évitées. Aujourd’hui,
le temps est venu pour que les politiques s’émancipent de tous les lobbies qui
font des bénéfices énormes tout en détruisant la planète. Ou encore, le temps
est venu d’émanciper la politique de l’emprise des intérêts particuliers et de la
placer sous le signe de l’intérêt général.

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