Une menace subtile guette nos sociétés qui découvrent l’enjeu écologique : celui d’une écologie « canada dry ». Elle a le goût, l’odeur, la couleur de l’écologie, mais ce n’est pas de l’écologie. Son origine est double. D’une part, l’élargissement de la prise de conscience de la menace que notre mode de développement fait peser sur la survie de l’humanité. D’autre part, la crainte que cette prise de conscience ne débouche sur une véritable remise en question. Sa caractéristique principale : on parle beaucoup d’écologie, surtout sur les plateaux de télévision, mais on en fait tout juste assez pour pouvoir dire qu’on en fait. Des déclarations solennelles sont lancées sur la révolution écologique, des engagements sont pris, mais ils ne sont que peu suivis d’effet.

Le remède: des mouvements et des partis écologistes forts, vigilants, intransigeants. Qui ne se réfugient pas dans la radicalité et la certitude d’avoir raison tous seuls, mais qui promeuvent la croissance de la convivialité et la réduction de l’empreinte écologique. Qui ont l’ambition d’être suffisamment forts pour nouer des alliances permettant de faire avancer rapidement leurs objectifs. Par exemple avec ceux qui se contentent actuellement de l’écologie « canada dry » mais qui passeraient bien à quelque chose d’un peu plus savoureux.

1ère raison: l’abîme entre paroles et actes chez les autres

Entre les paroles et les actes des partis non-écologistes en matière d’écologie, il y a parfois un abîme. Un jour, un historien écrira peut-être un « livre noir de l’anti-écologisme ». On y trouvera un certain nombre de formations politiques et de leurs membres. Au tournant du troisième millénaire, ils dénonçaient les « fossoyeurs de l’économie » et se mirent subitement à dire qu’il fallait d’urgence agir pour sauver la planète. Très bien. Il faut les prendre au mot. Enregistrer leurs conversions et mesurer le rétrécissement des abîmes entre leurs paroles et leurs actes. La vérification sera plus efficace dans les enceintes parlementaires. Parce qu’elle a lieu au cœur du processus de décision.

2e raison : les partis écologistes sont indépendants des lobbies de la société industrielle

Les participations gouvernementales des écologistes ont permis de constater à quel point les partis traditionnels ne sont pas encore tout à fait indépendants des lobbies industriels. Comment une réunion avec des représentants de secteurs industriels qui agitent la menace d’une délocalisation ou d’une perte de compétitivité suffit pour faire radicalement changer d’avis… Qu’il s’agisse d’Electrabel-Suez, de la fédération des auto-écoles ou de l’industrie chimique. Les partis écologistes peuvent être proches des associations environnementales ou des entreprises qui produisent des énergies renouvelables, mais ce n’est pas obligatoire et cela n’enlève rien à leur indépendance.

3e raison : une indépendance due à leur démocratie interne

Les écologistes ne sont pas des saints. Personne n’est radicalement incorruptible. Les partis verts savent bien que l’histoire de la démocratie, c’est l’histoire de l’invention de ses contre-pouvoirs et des procédures de reddition de comptes des représentants aux représentés. C’est parfois un peu lourd, ce n’est pas toujours exaltant, mais le débat interne et la participation effective des membres des partis verts est un gage d’indépendance à l’égard d’autres acteurs de la société et du champ politique.

4e raison : une indépendance due à leurs valeurs

Leur idéologie n’est pas un système fermé de dogmes acquis une fois pour toutes. Elle est ouverte au débat, aux évolutions historiques. Mais elle est bien structurée autour des idéaux progressistes de la justice et de l’émancipation. Justice : la solidarité intra-générationnelle étendue à tous les habitants de la planète est augmentée de la solidarité intergénérationnelle envers les générations futures. Défendre l’écosystème planétaire, c’est défendre les hommes qui en vivent. Le monde sera plus juste s’il est plus vert, au plan belge comme à l’échelle mondiale.

Cette solidarité « au cube » vise l’émancipation de tous les êtres humains qui doivent chacun avoir le droit de choisir leur vie. Mais toutes les réponses aux enjeux écologiques ne se valent pas. En Belgique, Ecolo propose une réponse globale aux défis de notre société : la régulation sociale et environnementale du capitalisme dans un sens démocratique et égalitaire. C’est une alternative moderne à la vieille gauche, embourbée dans la société industrielle et le clientélisme.

5e raison : les écologistes ont un rapport ouvert à la technique

Plutôt que d’attendre tout de la technique, les écologistes savent que la technique n’est qu’une partie de la réponse. Elle peut apporter des solutions. Quand on s’en sert de manière décentralisée et conviviale, elle est une source de progrès partagé. Mais si elle est confisquée par des pouvoirs fortement centralisés ou des intérêts privés, elle se retourne rapidement contre les hommes. La convivialité, c’est une société qui maîtrise la technique, qui lui donne une l’échelle humaine et qui ne se laisse pas dominer par elle.

6e raison : le projet des écologistes est radical

Leur compréhension du monde commence par la ‘racine’. Le mythe de la croissance illimitée qui apporte des solutions à tous les problèmes est partagé par les socialistes, les libéraux et les chrétiens-démocrates. A l’inverse, ce que les écologistes veulent, c’est une économie respectueuse des générations futures, des générations actuelles et de leur environnement. Qui préserve un monde fini et terriblement fragile pour nos enfants et petits enfants. Il ne s’agit pas de se contenter de l’aménager à la marge. Mais de convaincre le plus grand nombre de changer notre mode de vie de manière rapide et progressive. Les écologistes ne surfent pas sur des slogans creux comme celui de l’écologie humaine. Il est aussi néfaste de faire croire qu’on peut se contenter de mesures cosmétiques que de vouloir limiter la qualité de vie à un petit nombre de privilégiés.

7e raison : les écologistes ont mis en œuvre des solutions qui marchent

De Beckerich à Fribourg en passant par Paris, Genève, Lausanne, Gembloux et Assesse, les écologistes améliorent la vie quotidienne dans les communes qu’ils gèrent, tout en assurant leur modernisation écologique : plus de qualité de vie, plus d’emplois, plus de justice sociale.

Dans les gouvernements, en RFA comme en Belgique, ils mettent en œuvre les politiques les plus modernes et les plus sociales : refinancement de l’enseignement, régularisation des sans papiers, départicratisation des administrations, sortie du nucléaire, plan de développement des énergies renouvelables. Dans les débats fiscaux et sociaux, ils défendent toujours les positions les plus progressistes.

8e raison : quand les écologistes sont faibles, l’écologie régresse

En Belgique, de 1999 à 2003, dans le gouvernement arc-en-ciel, les écologistes ont permis le sauvetage du protocole de Kyoto à travers les négociations menées au nom de l’Union Européenne par Olivier Deleuze. En 2007, force est de constater que la majorité socialiste-libérale n’a presque rien fait pour atteindre l’objectif de réduction de 7,5% des émissions de Gaz à Effet de Serre. L’écologie a servi de prétexte pour augmenter les impôts, comme avec la taxe totalement inefficace sur les couverts en plastique. Des gares et des bureaux de poste ont été fermés et laissés à l’abandon. Il n’y a jamais eu autant de voitures et de congestion, ni d’émissions de gaz à effet de serre.

Au gouvernement wallon, le CDH et le PS se sont contentés de poursuivre la politique d’Ecolo pour la promotion des énergies renouvelables. Mais en même temps, ils vont investir presque l’équivalent du plan Marshal (800 millions) dans pour étendre de 28 km le réseau autoroutier.

En France, Nicolas Sarkozy a certes signé le pacte écologique et créé un beau ministère du Développement Durable. Mais il ne remet aucunement en question le nucléaire, les OGM, l’agriculture intensive. Il sera docile à l’égard de tous les lobbies : de l’automobile comme de la pêche ou de la chimie.

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